BAUX DEROGATOIRES :

Quelle règle applicable ?

L’article L. 145–5 du code de commerce prévoit que la durée totale du bail dérogatoire ou des baux successifs ne doit pas être supérieure à trois ans. Si, à l’expiration de cette durée, et au plus tard à l’issue d’un délai d’un mois à compter de l’échéance le preneur reste et est laissé en possession, il s’opère un nouveau bail dont l’effet est réglé par le statut des baux commerciaux.

Il en est de même, à l’expiration de cette durée, en cas de renouvellement expresse du bail ou de conclusion, entre les mêmes parties, d’un nouveau bail pour le même local.

Dans un arrêt du 25 mai 2023, la 3ème chambre civile de la Cour de Cassation décide que l’action en constatation du bail commercial née du maintien en possession du locataire est imprescriptible !

La nouvelle règle posée par la Cour de Cassation:

Dans cette espèce, un bail de courte durée est consenti à un locataire, puis presque deux ans plus tard, un nouveau bail est conclu pour quelques mois. À l’expiration du contrat, la société locataire reste dans les lieux et elle est laissée en possession par le bailleur.

Lorsque le bailleur se décide à demander le départ des lieux du locataire, ce dernier assigne en constatation de l’existence d’un bail commercial, du fait du maintien en possession au terme du bail dérogatoire.
La cour d’appel avait déclaré prescrite l’action de la société au motif que cette action aurait dû être entamée dans le délai de 5 ans à compter de la signature du premier bail, se fondant sur les dispositions de droit commun de l’article 2224 du code civil, non spécifiques au bail commercial, puisque le dérogatoire n’est pas, en tant que tel, un bail commercial.

Mais la Cour de cassation adopte un raisonnement différent en affirmant que le locataire, maintenu en possession des lieux, présente une demande tendant à faire constater l’existence d’un bail commercial statutaire.
La solution (ou la sanction) est donnée par l’article L. 145–5 du Code de commerce précité :« il s’opère un nouveau bail dont l’effet est réglé par le statut des baux commerciaux »
L’action en constatation du preneur à l’issue d’un bail dérogatoire qui résulte du seul fait de l’article L. 145–5 précité n’est donc pas, pour la Cour de Cassation, soumise à prescription puisque dans l’esprit, la loi s’est déjà appliquée de plein droit et le bail dérogatoire est déjà devenu bail commercial…

 Les préconisations pratiques:

Les bailleurs devront donc faire particulièrement attention à veiller au départ effectif de leurs locataires au terme des trois années des baux dérogatoires, sous peine de s’exposer à ce que leurs locataires revendiquent le bénéfice d’un bail commercial et ce même plusieurs années après la date à laquelle ils auraient dû partir…

À noter : le régime des baux dérogatoires est à distinguer de celui des conventions d’occupation précaire, dont la requalification en bail commercial peut, elle, être demandée dans le délai de 2 ans prévu à l’article L145 60 du code de commerce (action en requalification distincte de l’action en constatation)…

Gare aux différences – essentielles – des contrats périphériques aux baux commerciaux!

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